Les derniers jours de Stefan Zweig
J'avais acheté la biographie de Seksik juste après avoir lu la BD qui ne m'avait pas tout à fait convaincue, et grâce à Charlotte qui a aussi donné son avis sur la BD il y a peu, j'ai eu envie de lire enfin ce livre.
Et j'ai bien fait, car il s'agit d'un bel hommage à Zweig. La biographie lui rend mille fois plus justice que la BD. Nous suivons les derniers instants de Zweig et de sa femme Lotte, de leur arrivée au Brésil en septembre 1941 à leur suicide en février 1942. La plume de Laurent Seksik est délicate, pudique et modeste, comme l'a été Stefan Zweig. Et il ne s'agit pas seulement de retracer les derniers instants vécus et pensés de Stefan, mais aussi de Lotte, sa jeune seconde épouse, "éprise jusqu'au sacrifice ultime". Pour la germaniste que je suis, il a été également bon de lire les noms de Thomas Mann, Franz Werfel, Rilke ou Brecht et de se replonger, à travers les souvenirs et les pensées de Zweig, dans l'ambiance culturelle et littéraire de l'Autriche d'avant guerre,: cette "MittelEuropa dont il s'était fait le chantre, était un lieu de poètes, de rêveurs, un monde enchanteur, un conte pour enfants."
Les descriptions du Brésil sont aussi très réussies et met très clairement en valeur le contraste entre la clarté et la luminosité des lieux et les idées sombres et tristes du couple. "A peine eurent-ils posé un pied au-dehors qu'ils eurent la sensation d'être happés par la lumière, une clarté brulante qui enveloppait les êtres, semblait monter de l'océan, figer l'espace."
"Il sortit les les livres, un à un (...) Après la ferveur et la solennité avec lesquelles il avait ouvert les premiers ouvragesnil se mit à plonger le nez dans les suivants. il humait à pleines narines. Les pages avaient tout conservé. Le passé n'était ni mort, ni enterré. Il était préservé entre les pages de ces livres." (...) "Son existence reposait sur les étagères de la bibliothèque. Sa vie était entre deux planches".
Et le discours que tient Bernanos à Zweig, n'est-il pas en phase avec notre présent, à nous? "Nous disposons, nous, les écrivains, entre nos mains, au bout de nos doigts, d'une arme puissante. Il faut se montrer digne de ce don d'écrire".
Une très belle lecture, qui donne bien entendu envie de se replonger dans les oeuvres de Stefan Zweig (et là, je me demande pourquoi tout ce que j'ai est en français et non en allemand??? ma prochaine lecture de Zweig sera forcément en version originale...)
Les derniers jours de Stefan Zweig, Laurent Seksik, éditions J'ai lu